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Numéro 11 - rive spirituelle - septembre 2007

Abbé Régis de Saint-Rémy, prêtre

Compétence, un jeu subtil d'harmonie

Etre fidèle à la fonction qui est attribuée importe à chacun. Il faut s'évertuer à donner le maximum de ses possibilités, à être le meilleur et le plus compétent dans son rôle. Pour cela, on aura soin d'ordonner son travail avec méthode, de savoir discipliner les imprévus, de refuser une tâche pour ne pas s'éparpiller...   


Il y a deux sortes de compétences : la première consiste simplement à choisir la personne adéquate. Si le boulanger peut faire le pain, le philosophe se limitera à la philosophie. Chaque fonction, en accord avec la compétence de chacun, doit être définie à l'avance pour mieux respecter le champ d'action d'autrui. L'intelligence, l'humilité, le recul vis-à-vis de soi-même permettent de mieux connaître ses propres limites et par là même, de rester généreux et disponible.   

La seconde sorte de compétence, tout au contraire, n'a pas de limites : remplir ses engagements demande un investissement personnel dont le but est de développer un savoir-faire, favorisé par l'habitude "qui apprend le métier " et fortifié par l'expérience que l'on sait irremplaçable. Les paramètres de ce savoir-faire permettent de rentabiliser notre rôle dans une entreprise où il faut souvent composer avec les personnes et les circonstances. Comme dans tout acte volontaire, chacun est gardien, voire responsable, de sa propre compétence. Il faut de la patience et de la persévérance.   

Dans toute entreprise collective, les ressources humaines se doivent d'être réalistes, complémentaires et diversifiées pour assurer le maximum d'efficacité. Il faut donc déléguer. Les subordonnés peuvent être plus compétents que leurs supérieurs dans le domaine qui leur a été attribué, plus efficaces parce que plus proches de la réalité. Ils pourront ainsi y répondre de manière plus adéquate. S'adapter aux circonstances, rester attentif à l'environnement permettent la pleine application de principes partagés par tous.   

Notre monde cherche souvent à plaquer un idéal plutôt qu'à résoudre au fur et à mesure les problèmes qui se succèdent, ce " principe de délégation ", plus complet qu'un simple partage du pouvoir, repose sur la hiérarchie tout entière, et reste vraiment réaliste. Il limite, en outre, les défauts inhérents à la nature humaine : l'ambition, tout d'abord, qui cherche à gagner et à maintenir le pouvoir personnel qui doit rester avant tout au service du bien commun. Ensuite la jalousie, qui commence par comparer avant de diviser et finalement détruire, souvent de manière inconsciente, au lieu de respecter la nécessaire diversité des personnes et des choses.   

Ce "principe de délégation" semble essentiel pour que les philosophes lui aient donné un nom, celui de " principe de subsidiarité ". Il s'agit de reconnaître que " ce qui est subsidiaire est indispensable à ce qui est principal ", autrement dit que les subordonnés sont aussi importants que les responsables. Ce principe contractuel est trop souvent méconnu dans nos sociétés individualistes et égoïstes. Les apports techniques, certes efficaces mais limités, ont tendance à y remplacer les rapports humains, échanges indispensables de réciprocité entre ceux qui construisent le même édifice.   

C'est le bénévolat qui, actuellement, essaye d'appliquer le plus fidèlement ce principe de subsidiarité, car ceux qui le composent tendent tous vers un même idéal, le bien commun, celui qui ne nous appartient pas. Naturellement désintéressé, le bénévolat recherche l'efficacité, et donc, la compétence.   

Comparons chaque entreprise humaine à une mélodie. Elle requiert tout d'abord un compositeur, doué d'une vue d'ensemble et sachant attribuer à chacun sa partition. La mélodie, dans son exécution, est ensuite composée d'un chef d'orchestre dirigeant les instruments, ces derniers remplissant fidèlement leur tâche. Finalement, tous sont responsables des fausses notes, qui portent alors atteinte à l'harmonie de l'ensemble.



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