la revue électronique de l'Institut de Recherche et d'Information sur le Volontariat (iriv) - www.iriv.net
« La meilleure des universités est une collection de livres.»
Thomas Carlyle (Eaglais Fheichein, Ecosse, 1795 – Londres, 1881).
L'institut de recherche et d'information sur le volontariat - iriv (www.iriv.net)
est un Institut privé qui travaille sur le bénévolat et le volontariat & l’éducation et la formation tout
au long de la vie. Créée en 2004 par Bénédicte Halba et Eve-Marie Halba, présidente et
secrétaire générale de l'iriv, la revue propose une réflexion sur des thèmes aussi variés que l'expérience, la promesse,
la différence, ou les confins... avec des témoignages venus de France, d'Europe et du reste du Monde.
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« The greatest university of all is a collection of books.»
Thomas Carlyle (Eaglais Fheichein, Scotland, 1795 – London, 1881).
The institute for research and information on volunteering (www.iriv.net)
is a private institute specializing in the non-for-profit sector in Lifelong Learning (LLL). It has directed,
coordinated, and been involved in many European and national projects. Its electronic review, les rives de l'iriv - www.benevolat.net -
was created in 2004 by Bénédicte Halba and Eve-Marie Halba, president and general secretary of the Institute.
The review has published articles on topics as various as experience, promise, difference or borders with contributions from France,
Europe and worldwide.
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Claire Millot, bénévole association Salam
La mer se met à bouillir... elle renverse tout... elle écrase tout.
Dans la nuit du 14 au 15 septembre, elle jette un canot pneumatique sur les rochers d'Ambleteuse. Le fond se déchire. Huit morts.
On la personnifie... elle nous effraie... on lui en veut...
Et pourtant : «…le temps était très doux hier soir, la mer était très belle, très calme et très innocente !!! Ce n'est pas elle la responsable ... », nous écrit Ghislaine, le 5 septembre. Elle revenait d’une commémoration, celle du naufrage qui avait fait douze morts et deux disparus… Ne nous voilons pas la face, cela fait quatorze morts…
Elle a raison. La mer est innocente. Ce sont nos autorités, les responsables.
Après les décès de la nuit du 14 au 15 septembre, ma petite sœur m'envoie un gros câlin par SMS. Ce n'est pas un câlin qu'il me faut... "Je veux de la poudre et des balles ", disait l'enfant grec de Victor Hugo. (2)
Bien sûr nous sommes tristes devant ces jeunes vies fauchées en pleine mer.
Mais nous sommes surtout en colère : la tempête est sous mon crâne.
En colère, parce qu'on savait que cela allait se reproduire. Dans mon lit, bien au chaud, ce matin-là, je me disais : " Bientôt quinze jours sans naufrages... A quand le suivant?" Je tends le bras vers le téléphone hors du lit douillet... Huit morts dans la nuit.
Encore plus en colère, parce qu’on sait que cela ne peut que se reproduire encore et encore. Bien sûr.
En 2018 quand les Iraniens ont pris la mer, les premiers, parce que les passages en camion étaient de plus en plus compliqués, nous étions tous sidérés d'apprendre qu'ils arrivaient sains et saufs de l'autre côté. Sidérés nous, qui savons les vagues, les courants qui s'inversent et se ré-inversent et les perdent, les passages de cargos dans les deux sens… sidérés les Africains qui avaient traversé la Méditerranée en pirogue et tournaient résolument le dos à la mer.
Et puis, à force de les empêcher de faire tout droit les trente kilomètres de Calais à Douvres, à force de confisquer leurs canots, de les crever ou brûler sur le sable, à force de les inciter à entrer dans l’eau jusqu’en dessous des bras pour monter dans des embarcations à l’abri des violences policières, on pousse les exilés à prendre de plus en plus de risques. Et nous en sommes, ce matin du 6 octobre, à 56 morts (car nous comptons les disparus…) depuis début 2024.
La tempête n’a pas compté ses mois, ses années, pour façonner les falaises, au Blanc Nez comme à Douvres, usant vague après vague la résistance du rocher… Elle fait tomber un peu de poudre à chaque passage et un pan entier de muraille parfois.
Nous aussi, inlassablement nous attaquons et attaquons encore, pour
Lui, il n’a alors plus qu’à disparaître, à retourner à la tempête du quotidien, en passager clandestin, réduit au travail au noir, au logement précaire, la peur au ventre à chaque fois qu’il aperçoit un uniforme de police, et en prime lesté de la pierre au cou qu’est l’OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français).
Il faut qu’on leur offre très vite, à leur arrivée en France, des papiers pour deux ou trois ans avec autorisation de travailler légalement, et prolongation ensuite pour dix ans, puis à vie si tout va bien.
(1) association Salam- L’association SALAM (Soutenons. Aidons. Luttons, Agissons pour les Migrants et les pays en difficulté, https://www.associationsalam.org/
(2) L’enfant grec, dans « Les Orientales », 8/10 juillet 1828